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La Capitale de la Littérature Allemande (suite)

Sanary vue par les exilés de langue allemande 1933-1942

Pourquoi Sanary-sur-Mer?
Mais pourquoi sont-ils restés au lieu de partir tout de suite vers les Etats-Unis, le Mexique ou l’Union Soviétique? N’aurait-il pas été plus facile et plus logique de choisir un lieu comme Marseille ou Nice, comme l’ont fait les écrivains Heinrich Mann ou Joseph Roth. De 1933 à 1939 - c’est-à-dire dès l’arrivée de Hitler au pouvoir jusqu’à la déclaration de la guerre - la plupart des exilés se sentaient bien à Sanary. Pour Lion Feuchtwanger qui vivait de 1933 jusqu’à 1940 à Sanary, cette période était la plus féconde de sa carrière littéraire. Durant ces sept ans, il écrivait plusieurs romans et une grande quantité d’articles journalistiques et lettres. Sa résidence, d’abord la villa “Lazare”, après la villa “Valmer” avec son immense bibliothèque devint un des centres de la littérature exilée dans le monde. On voit très bien son penchant pour Sanary dans une citation de son livre “Le Diable en France”: Pour René Schickelé, Sanary n’est pas seulement un lieu d’inspiration - son roman “La veuve Bosca”, considéré comme son chef-d’oeuvre, se déroule entièrement à Sanary qu’il rebaptisa Ranas.

Ludwig Marcuse qui n’avait pas les mêmes moyens financiers que Lion Feuchtwanger voyait la situation de l’exil à Sanary d’une manière plus critique: On était dans le pays où Dieu se sentit à une certaine époque le plus à l’aise. […] Tout était bleu azur, sauf nos âmes. […] On était au paradis – à contre-coeur.

La situation devint grave pour les exilés
A cause de leur nationalité allemande ou autrichienne, ils sont soupçonnés d’être des espions nazis, la fameuse “cinquième colonne”. La population se méfia de ces étrangers ennemis et devint hostile. Seul l’écrivain René Schickelé prédit cette situation déjà en 1934 dans son journal intime: Sanary qu’on nomma l’an dernier “Sanary-les-Allemands” portera cette année le sobriquet “Sanary-les-Juifs”.

Un jour, la police sanaryenne vint chez l’écrivain Franz Werfel dans sa villa “Le Moulin Gris”, parce que la population le soupçonnait d’être un espion. La veille, Werfel avait cherché avec une torche un manuscrit - la population avait pensé qu’il faisait des signes à des navires de guerre allemands croisant au large… l’espionnite et les dénonciations culminèrent dans les internements. En septembre 1939 et en mai 1940, tous les sujets allemands et autrichiens entre 17 et 65 ans (même ceux qui avaient adopté la nationalité tchèque, car ils avaient été privés de leur nationalité d’origine par les nazis) furent déportés au camp des Milles près d’Aix-en-Provence, les femmes au camp de Gurs dans le département Basses-Pyrénées.

Fin tragique de “l’Exil au Paradis“
Avec la “drôle de guerre”, l’invasion des Allemands en France, l’occupation et les déportations aux camps d’internements et plus tard aux camps de concentration finit l’histoire de la “capitale de la littérature allemande”. Les intellectuels essayaient normalement tous de quitter le pays le plus vite possible. Lion Feuchtwanger réussit par exemple une fuite spectaculaire du camp des Milles, ensuite il se sauva avec sa femme Marta aux Etats-Unis. Franz Werfel et sa femme Alma Mahler-Werfel prirent la fuite par les Pyrénées, avec Heinrich Mann, l’épouse de celui-ci, Nelly Kröger, et leur neveu Golo pour prendre un bateau à Lisbonne. Certains n’avaient pas tant de chance: Le flâneur de deux rives Franz Hessel mourut à Sanary en janvier 1941. Il est le seul des exilés qui fut enterré au cimetière local. Son ami, le philosophe Walter Benjamin, se suicida, quand il n’obtint pas la permission de passer la frontière espagnole. Et l’écrivain Hans Arno Joachim fut déporté et tué à Auschwitz.

N’oublions pas de citer quelques lignes de l’oeuvre de Klaus et Erika Mann pour conclure ce chapitre extraordinaire de la littérature allemande en exil: Les petites communes Sanary et Bandol hébergent autant de célébrité que Hollywood ou les quartiers bohèmes de grandes villes.

© Magali Laure Nieradka, novembre 2005

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